L'accordage affectif mère-enfant

Anne Danion, professeur de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'université Louis-Pasteur de Strasbourg, soulignant l'importance de l'"accordage affectif" mère-enfant décrit par Daniel Stern

«Dans une société hyper-individualiste qui souffre d'un manque de repères, les jeunes couples savent de moins en moins quels sont les besoins d'un petit enfant» analyse le Pr. Anne Danion, la mère perçoit les émotions de son nourrisson et va lui montrer qu'elle les a comprises avec des intonations, des gestes, des sourires, des mimiques, etc.
En retour, l'enfant saisit progressivement que ses propres émotions ont été bien captées. Tout ceci va faire le lit du langage.

DIFFICULTÉS D' ACCORDAGE


Mais les réactions d'un bébé sont très influencées par l'état psychique de sa mère comme l'objectivent très bien des vidéos dites de «still face» (visage immobile).

Reste qu'il n'est pas toujours facile de devenir mère et que ces difficultés d'accordage font le lit de la dépression. Et ce dans tous les milieux. «On a réduit drastiquement le temps passé à la maternité, qui permettait de faciliter l'instauration de ce précieux lien entre les mères et leur bébé, déplore le Pr. Danion.

Il faudrait qu'il y ait à l'extérieur, dès le retour à la maison, des équipes de puéricultrices pour pallier cela et aider les jeunes mères.» D'autant que la valeur de l'exemple de la transmission intrafamiliale se fait rare.

Ce médecin s'interroge aussi sur la continuité de ce lien à l'issue du congé maternité, qui en France est beaucoup trop court par rapport aux pays scandinaves. Les jeunes femmes travaillent, confient leur bébé à une nourrice ou à une crèche, et courent tout le temps.
«On voit des nourrissons qui passent d'un lien à l'autre et qui en réaction bougent beaucoup et peuvent devenir tyranniques» constate le Pr. Danion.

Notre mode de vie actuel n'est-il pas directement la cause de l'augmentation des cas d'hyperactivité et plus largement de comportements d'enfants capricieux voire même tyranniques?»


Forte de son expérience de psychiatre spécialiste des enfants et des adolescents, elle plaide pour un congé maternité plus long, idéalement entre six et douze mois. «Mettre un enfant en garde dès l'âge de deux mois et demi est une aberration. Car la socialisation n'a de sens que si le lien avec la mère est déjà suffisamment solide.»

source: Le Figaro -17 01 06 -